Tendinite du coude et prévention :  TMS sans solution ?

Tendinite du coude et prévention : TMS sans solution ?

Généralités sur l’épicondylite

L’épicondylite, ou tendinite latérale du coude, est un trouble musculo-squelettique dont la prévalence est entre 0.7 et 4% dans la population (pouvant atteindre 30% dans certains secteurs d’activité). Elle représente 22% des TMS reconnus par l’Assurance Maladie. On surnomme souvent cette affection « tennis elbow » du fait de sa grande présence chez les tennismen. Néanmoins, elle touche de façon générale une large population, et pas que les sportifs, puisque seulement 10% des personnes avec une épicondylite jouent au tennis. Son traitement et sa prévention sont donc des problèmes de santé publique.

Cliniquement, l’épicondylite se manifeste par des douleurs au niveau de la partie externe du coude, contre l’os. Cela correspond à la zone où les tendons (partie terminale du muscle) s’attachent sur l’os. Ces douleurs, parfois violentes et handicapantes, peuvent irradier le long de l’avant-bras jusqu’à la main. Le tendon communs des muscles épicondyliens (d’où le nom !) regroupe 5 muscles et pour les plus curieux, la plupart des études semblent incriminer le muscle court extenseur radial du carpe. Si le nom importe peu, contentons-nous de remarquer que c’est un muscle utile à l’extension du poignet (mouvement d’accélération de la moto).

Zone anatomique de l’épicondylite

Origine et facteurs de risque

Alors d’où vient cette affection et quels sont les facteurs qui favorisent son apparition ?

Premièrement, nous avons longtemps simplifié la tendinite comme une inflammation du tendon. Aujourd’hui, du moins en ce qui concerne le coude, les données physiopathologiques nuancent beaucoup ce propos. En effet, les recherches sur le sujet notent un remaniement des cellules à l’intérieur du tendon plutôt qu’une inflammation, bien qu’elle soit existante. Plusieurs mécanismes sont probablement encore à élucider sur ce point, mais il semblerait que la pathologie se manifeste par l’association d’une dégénérescence chronique du tendon et d’une inflammation.

Ensuite, il est assez largement répandu que la maladie survient généralement après une utilisation excessive des muscles du coude. Une surcharge de l’appareil extenseur, que ce soit en force ou avec des gestes répétitifs, favorise l’apparition de l’épicondylite. Si le muscle ne peut pas supporter la charge qui lui est imposée, des douleurs se manifestent (ce qui est d’ailleurs le cas dans tout le corps). Il est donc important de garder à l’esprit que des gestes stéréotypés ne sont pas bons car ils sollicitent constamment les mêmes structures.

À l’inverse, ce qui est moins intuitif, une personne inactive à également plus de risque de présenter une épicondylite. Une utilisation restreinte des muscles engendre un affaiblissement des structures tendineuses ce qui les rend fragiles et dégénératives. C’est notamment une hypothèse avancée pour expliquer la plus grande présence de cette pathologie chez les femmes.

En effet, l’épicondylite est environ 3 fois plus présente chez la femme. Les autres facteurs de risque sont :

  • Le diabète
  • La tabagisme
  • L’âge (plus de fréquence entre 40 et 60 ans)
  • Enfin, on remarque davantage de tendinite sur le membre dominant, ce qui est logique au vu de l’utilisation que l’on en fait.

Évolution naturelle de la maladie

Maintenant que les bases sont connues, comment cela évolue-t-il ?

Voici la bonne nouvelle du jour : l’épicondylite évolue favorablement, de façon spontanée. Si vous ne faites rien, elle va partir comme elle est venue et vous pourrez reprendre votre vie d’avant. En revanche, et c’est la mauvaise nouvelle, cela va prendre environ 1 an, parfois 2. En effet, les recherches montrent qu’au bout d’un an, il n’y a pas de différence entre une personne qui n’a reçu aucun traitement d’une autre qui a été suivi par un médecin, un kinésithérapeute ou autre.

Toutefois, comme cette maladie peut être invalidante, nous allons regarder les traitements qui existent pour faire diminuer le temps de récupération ou pour améliorer les symptômes.

Les traitements

En pratique, il existe une multitude de traitements proposés, et beaucoup semblent inefficaces. Comme l’évolution est longue et lente, il est facile de comprendre que les patients aient recours à diverses méthodes pour tenter de faire disparaitre les douleurs.

Commençons par les traitements qui seraient plutôt à déconseiller.

L’infiltration de corticoïdes, qui est une approche assez répandue, peut procurer un soulagement à court terme mais fait augmenter sur le long terme le temps de récupération, ce qui n’est pas du tout souhaitable. De même, l’opération ne devrait pas être un traitement de première intension, étant donné que c’est une procédure invasive, ce qui ne semble pas légitime au vu de l’évolution naturelle de la maladie.

En ce qui concerne les traitements non-efficaces, nous pouvons citer les attelles, le massage, les ultrasons et les médicaments. Les anti-inflammatoires n’ont eux non plus pas l’air d’être très efficaces. En considérant que la douleur ne viennent pas simplement d’une inflammation, on peut logiquement s’attendre à ce que leur effet reste négligeable.

Enfin, que pouvons-nous faire ? Le principal traitement qui ait fait ses preuves est le renforcement. Travailler le muscle pour favoriser sa régénération et lui donner la possibilité d’absorber les efforts inhérents aux tâches quotidiennes ou à l’activité sportive. Il n’est donc pas forcément conseillé d’arrêter totalement le sport avec une tendinite. Le principal est d’adapter l’effort et l’activité aux capacités du muscle. La douleur est évidemment à prendre en compte, il n’est pas bénéfique de l’ignorer mais il faut continuer l’activité jusqu’à un seuil tolérable de douleur. Comme nous l’avons vu précédemment, déconditionner le muscle n’est jamais une bonne idée, et ce n’est certainement pas un traitement.

Pour finir, les ondes de choc peuvent améliorer les symptômes mais ne présentent pas de meilleurs résultats qu’un autre traitement. Leur utilisation peut donc s’ajouter au renforcement.

Et la prévention ?

Comme souvent, nous manquons d’études sur des approches préventives. Néanmoins, si l’épicondylite survient de préférence chez des gens avec peu de muscles, ou qui n’en ont pas suffisamment pour supporter les charges intenses, il est logique de recommander de renforcer les muscles des avant-bras pour limiter le risque de ces maladies ! Pensons à mettre en avant les solutions actives et non passives. Arrêtons donc de penser qu’il faille absolument du repos total pour soulager les douleurs, le corps se renforce avec l’activité !

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